Les petits gestes créatifs donnent confiance

Deux soirs consécutifs, après les devoirs habituels, mon 9 ans s’est assis pour préparer « sa » dictée, emballé à l’idée de trouver des phrases qui feraient sourire et réfléchir ses camarades. Il a fait sa première version seul, sans aide, à l’ordinateur. Nous avons ensuite corrigé les phrases en écrivant à la main la version finale. J’en ai profité pour lui expliquer l’importance de l’écriture et du geste physique en général dans l’apprentissage et le développement du cerveau, comme au ski ou en vélo. Il était tout impressionné et ça a ralenti les ardeurs contestataires de l’écriture manuelle pour cet exercice. 😆

Lorsqu’il eu complété son travail, je lui ai dit à la blague: « Alors, tu penses encore que tu n’as pas fait de dictée cette semaine? » Il a alors compris qu’il y avait eu des petits caractères sous la responsabilité de faire la dictée pour la classe… Il m’a quand même répondu, du tac au tac, que c’est bien plus agréable d’inventer les phrases que de simplement écrire ce qu’on se fait réciter.

C’est vrai : la créativité est un moteur de motivation, d’engagement et de mobilisation fondamental. Le personnel enseignant est formé pour utiliser toutes sortes de stratégies de mobilisation créatives avec les enfants (et les ados). Ils sont fantastiques et il est essentiel de reconnaître et de valoriser leur travail. Comme parents, c’est souvent difficile de trouver de telles stratégiques au quotidien. On peine parfois à rester calmes et à ne pas perdre patience au bout de la journée, alors être créatifs à l’heure du bain pour éviter la crise… pas évident!

J’aime m’inspirer des initiatives autour de moi. Donner des responsabilités et accompagner les enfants dans la réalisation des travaux qui en découlent est ma stratégie préférée. C’est souvent beaucoup plus long que si je le faisais moi-même, et évidemment pas « aussi bien fait ». Mais ça leur donne confiance, ça construit leur personnalité, ça développe leur autonomie, ça me permet de connecter avec eux et de partager des moments doux et lents dans le calme et la bienveillance. Je répète: ce n’est pas toujours évident! Et ça ne fonctionne pas tout le temps (de mon côté comme du leur). C’est une œuvre en cours d’élaboration (le fameux un work in progress, mais je dois dire que je préfère de loin la version française!) une approche de la dynamique familiale, une vision, une philosophie, un mode de vie. C’est un petit geste quand on est disposé à le faire, puis ça devient chaque fois plus fluide, plus naturel, plus simple, plus « normal », plus doux et plus beau.

J’ai appris progressivement à me faire confiance, comme personne et comme parents. Ça aussi, c’est œuvre en cours d’élaboration. Les écueils et les défis sont nombreux, donnant parfois l’impression de tomber dans des phases de régression. Ce n’est toutefois pas le cas; chaque jour ne peut pas être une ascension et les plateaux sont nombreux. Comme en montagne, la cime se rapproche malgré tout à chaque pas; le moment d’où on se sent complète se rapproche aussi. Le mieux est l’ennemi du bien et le perfectionnisme est définitivement passé de la colonne des qualités à celle des points à travailler dans les dernières années. Je crois que l’humilité, la connaissance de soi, l’écoute (de soi et des autres), l’empathie et le laisser-aller sont les outils dont on peut se doter pour bien voir éclore notre point de floraison lors qu’il se dévoile à nous en se détachant d’une attitude de performance.

Soyez douces et doux avec vous. Le printemps nous rappelle que la vie est un cycle et que chaque jour est un cadeau.

 

Une berceuse (4): Les chats sauvages

Du haut de ses deux ans et demi, mon BébéTigre (savait) déjà ce qu’il (voulait) dans plusieurs départements. La routine du coucher n’y fait pas exception. Quand « c’est maman qui couche », la séquence qu’il avait établie un peu plus d’un an auparavant demeurait alors inchangée : bain, crème et chatouilles, Salinex et mouche-bébé au besoin, PJ et chatouilles, brosser les dents, câlins et bisous à son grand frère et papa, retour dans la chambre pour choisir l’histoire, agripper Doudou et la bouteille d’eau, s’asseoir sur maman dans la berceuse pour la lecture, aller grimper dans son lit avec Doudou et la bouteille d’eau pour la berceuse après que j’aie éteint la lumière. Vous voyez le lien?

Ben oui, toi, une berceuse peut être une chaise à bascule ou une chanson. Les deux aident à apprivoiser le nouveau-né, le calmer et l’endormir; quant à moi, j’ai passé un temps fou assise là, à chantonner ceci et cela à mes enfants lovés dans mes bras, me refusant à déposer les petits paquets d’amour au lit après une séance d’allaitement nocturne ou entre deux poussées de fièvre. Lire la suite

Un matin comme les autres

On dit souvent qu’avoir des enfants, c’est du sport, mais on le dit rarement littéralement. Sauf que… c’est du sport en sivouplaît! L’entraînement quotidien est complet: physique, psychologique, émotionnel et affectif. Par exemple, la run du matin, un petit matin comme les autres, dure trois heures. 1, 2, 3, go! Lire la suite

Une berceuse (3) : Pour un instant

Les souvenirs Facebook m’ont gentiment rappelé un des plus beaux jours de ma vie cette semaine : ma rencontre avec Serge Fiori, à l’occasion d’une séance de dédicaces de sa biographie « Serge Fiori : S’enlever du chemin » par Louise Thériault. Je me suis évidemment fait plaisir en rejouant tous les albums, profitant particulièrement du son magnétique et de la jouissance auditive hypnotisante de l’écoute des disques vinyle. J’ai aussi rejoué la rencontre dans mon esprit : comment oublier que, ô combien intimidée par le géant, mon cœur battant la chamade m’a fait débouler sur mes mots; comment, ô combien gênée face à un pilier de mon identité et de celle de mon peuple, je me suis mal exprimée alors que j’avais tant répété ce que je voulais partager…

Harmonium a bercé mon enfance et façonné mon adolescence, construisant l’adulte que je suis devenue. Le message, sa portée, sa spiritualité, sa profondeur; la musique, en paliers, en itérations, en vagues riches à la fois douces et puissantes; la langue, la magie des mots qui se déploient en images et dansent en jeux de langage; l’expérience transcendante grâce à laquelle l’esprit s’élève au-delà de la cinquième saison et du septième ciel, le mantra libérateur qui vibre au son du om universel; l’histoire, les histoires, le tournant historique et son contexte politique : tout est parfait dans cette œuvre. Tout. Parfait, absolu, achevé, complet. Et puis cette voix; si le cristal pouvait chanter, c’est la robe de bal qu’il revêtirait, blanche comme l’éternité. Pour vivre un grand moment de paix intérieure, à la fois bouleversant et apaisant, enfilez un casque d’écoute, asseyez-vous confortablement, montez le volume puis fermez les yeux pour vous laisser transporter par la voix de Fiori sur Lumière de vie ou Comme un sage, pure et vraie.

Au premier jet, j’avais écrit « et fermez les yeux pour vous laisser bercer par la voix de Fiori », comme elle a bercé mon enfance, comme la chanson berce mon fils par l’entremise de ma voix chaque soir. En fait, les deux verbes s’appliquent; les deux émotions si proches se chevauchent, se complètent, se fondent l’une dans l’autre pour n’en former plus qu’une : le bien-être. Celui qu’on ressent et celui qu’on souhaite offrir, cherchant toujours à le préserver et à le faire grandir. De la même manière, la musique et les paroles d’Harmonium touchent au plus profond de nous, individus et collectivité, une corde sensible et intégrale : notre humanité.

C’est spontanément que je me suis mise à chanter Pour un instant à mon PetitRenard à l’aube de sa première année, par une nuit noire de pleurs inconsolables. La chanson est montée de mes tripes, a émergé d’elle-même du plus profond de moi-même, comme s’il était écrit que cet instant se produirait, comme si toute ma vie m’y avait conduit. En l’espace de quelques secondes, l’enfant s’est apaisé.  J’offrais à ma progéniture un instant de paix qui m’envahissait aussi. Surprise et émue, fière mais humble, la mère a pleuré sans retenue, serrant contre elle le fruit de ses entrailles, pour un instant.

Il n’a cessé de réclamer Pour un instant depuis, se délectant chaque fois d’un secret partagé avec sa mère le temps d’une chanson, pour déposer son corps et son esprit dans son lit en préparation de la léthargie. Et puis le soir où, lové contre moi dans la chaise berçante, sans avertissement, le PetitRenard a entonné la berceuse avec moi; le jour où il m’a hurlé de monter le son en reconnaissant à la radio les premières notes de cri de liberté; la fois où j’ai dû rebrousser chemin pour aller chercher le CD à la maison avant un road trip pour faire cesser les cris de protestation.

Comme l’ensemble de l’œuvre d’Harmonium (et plus généralement de Fiori) qui voyage sur une longueur d’onde singulière et inimitable, Pour un instant est une méditation, un message politique, une philosophie de vie; une ode à l’acceptation de soi. L’aviez-vous déjà perçue comme ça? J’aime l’idée que les enfants en saisiront tous les sens à différentes étapes de leurs vies. Alors voici, une berceuse pour le cœur, une berceuse pour l’esprit, un objectif de vie.

Pour un instant

paroles de Serge Fiori, Michel Normandeau
musique de Michel Normandeau

Pour un instant, j’ai oublié mon nom
Ça m’a permis enfin d’écrire cette chanson

Pour un instant, j’ai retourné mon miroir
Ça m’a permis enfin de mieux me voir

Sans m’arrêter, j’ai foncé dans le noir
Pris comme un loup qui n’a plus d’espoir

J’ai perdu mon temps à gagner du temps
J’ai besoin de me trouver une histoire à me conter

Pour un instant, j’ai respiré très fort
Ça m’a permis de visiter mon corps

Des inconnus vivent en roi chez moi
Moi qui avais accepté leurs lois

J’ai perdu mon temps à gagner du temps
J’ai besoin de me trouver une histoire à me conter

Pour un instant, j’ai oublié mon nom
Ça m’a permis enfin d’écrire cette chanson

 

Pour les curieux, voyez ce sourire de fan finie complètement comblée!

 

 

Source de l’image : Briony Marshall, sculpteure

Quatre ans

Mon PetitRenard a eu quatre ans la semaine passée! 4 ans…

48 mois.
208,7 semaines.
1461 jours.
35 064 heures, ou environ 1000 semaines de travail!
2 103 840 minutes.
126 230 400 secondes.

Ça dépasse l’entendement.

Depuis la moitié de sa vie, on ne compte presque plus son âge en mois – 24 mois. Et définitivement plus à compter de 36 mois. Dans notre cas, c’est allé avec la taille des vêtements et ça fait déjà longtemps qu’on porte des tailles en « ans ». Mais je ne serais pas prête à en arriver à 5 ans malgré cela! Chaque chose en son temps. (Ah, comme on y revient. Inlassablement.)

Pour le moment, le jalon que nous vivons m’émeut et me rend fière. Ce n’est pas seulement l’anniversaire de la naissance de notre PetitRenard; c’est aussi celui de ma parentalité et de celle de Chéri; c’est derechef celui de notre nouvelle vie ainsi que celui de la fondation de notre famille. C’est ça, la marque de l’aîné? Lire la suite